Être parent d’un enfant « différent »

Enfant différent

Voici un article que j’avais à cœur d’écrire depuis bien longtemps, mais je sentais que ce n’était pas encore le moment.

Ça l’est aujourd’hui, je me sens prête, après une longue année d’absence sur le blog.

Un article écrit avec avec le coeur, avec les tripes.

Un article qui je le sais, résonnera pour de nombreux parents traversant les mêmes choses.

Je vous laisse le soin de le lire, et de comprendre…

Précision 1 : Les exemples donnés sont un mélange entre des morceaux de mon vécu, et les anecdotes d’autres parents concernés par des problématiques similaires.
Cependant toutes sont véridiques. Je reste volontairement floue sur mon vécu personnel à ce sujet, par pudeur pour mon fils.

Précision 2 : Je parle ici de vécus véritables et fréquents de parents d’enfants « différents », mais évidemment cela ne peut refléter le vécu de tous les parents d’enfants « différents », chaque vécu étant différent aussi ^^.
J’imagine que certains points parleront davantage aux parents des enfants dont la différence est « invisible » (TSA, TDAH, HPI, troubles DYS…).

Précision 3 : Je mets le terme « différent » entre guillemets puisque évidemment chaque enfant est unique et donc « différent » à sa manière. Je parle là de particularités marquées : de fonctionnements neurologiques différents de la majorité, de handicaps quels qu’ils soient, etc.


Être parent d’un enfant différent…

Être parent d’un enfant « différent », lorsque la différence est « invisible », c’est passer par une grande période d’incompréhensions face aux comportements déstabilisants de son enfant.
Chercher, s’informer, et malgré tout ne pas comprendre, comme s’il manquait la pièce majeure d’un puzzle, sans laquelle rien n’a de sens.

Être parent d’un enfant différent, c’est pour certains être convoqué dès la première semaine d’école pour entendre les pires choses sur son enfant qui « ne rentre pas dans le moule ».
Puis aller de convocation en convocation, se faire entendre dire « je n’ai jamais vu ça en 20 ans de métier », « c’est parce que vous êtes trop gentille avec lui, madame » ou autres phrases si difficiles à entendre, et ressortir en pleurs, souvent.

Être parent d’un enfant différent, c’est, une fois la prise de conscience de la différence passée, vivre un véritable parcours du combattant, long et fastidieux, pour enfin obtenir un diagnostic et mieux comprendre les difficultés de son enfant. C’est parfois s’entendre dire que tout est dans notre tête, alors qu’en tant que parent, on le sait, dans notre cœur, qu’il y a quelque chose !

Être parent d’un enfant différent, c’est dans le meilleur des cas se sentir incroyablement chanceux de pouvoir scolariser son enfant dans de bonnes conditions, et dans d’autres cas, vivre de plein fouet l’injustice d’une société validiste, non inclusive.

C’est pour certains renoncer à l’inclusion et opter pour l’école spécialisée alors que ce n’était pas le choix de départ de la famille, mais qui va se révéler être la solution la plus acceptable face à la violence et non prise en compte des besoins spécifiques du système classique. Pour d’autres, ce sera le choix de l’IEF (Instruction En Famille), mais là aussi, un choix qui ne correspond pas forcément au choix de vie de la famille, mais s’impose pour fuir un système qui ne sait pas s’adapter à la différence. (Parfois il ne s’agira même pas d’un semblant de choix d’ailleurs, l’enfant sera tout bonnement et simplement exclu de l’école). Les familles qui pourront obtenir la totalité des aménagements dont l’enfant a besoin pour se sentir bien et être opérationnel à l’école, ainsi qu’un accompagnement et une écoute bienveillante, mesureront leur chance incroyable.

Être parent d’un enfant différent, c’est avoir un emploi du temps de ministre entre les rdv de suivi hebdomadaires (psychologue, pédopsychiatre, ergothérapeute, orthophoniste, …), les réunions de mises en place d’aménagements spécifiques et de suivi avec l’école, les réunions avec les pros, les démarches pour obtenir des aides humaines à l’école (AESH), etc.

Être parent d’un enfant différent, c’est souvent devoir adapter sa vie professionnelle pour pouvoir assurer ce poste d’aidant familial à côté, surtout si l’enfant ne peut pas être scolarisé à temps plein, voire pour certains, pas scolarisé du tout.

Être parent d’un enfant différent, c’est traverser des périodes où l’on a l’impression d’être l’avocat de son enfant, d’être le seul à vraiment le comprendre et de devoir toujours le défendre de la violence extérieure à son égard.

Être parent d’un enfant différent, c’est apprendre à ne plus se laisser atteindre par les remarques, jugements, voire insultes de passants dans la rue/d’autres parents au parc/de connaissances/voire de l’entourage proche.
Parce que, qu’on se le dise, quand un enfant a des comportements sociaux totalement « inadaptés » (et par là je veux dire totalement déconcertants/incompréhensibles pour qui n’est pas formé aux troubles invisibles de l’enfant), évidemment que le parent sera jugé responsable (incompétent/laxiste/négligeant/voire maltraitant) de ces comportements.
Cela est probablement encore plus vrai si ce parent adopte une approche de l’éducation respectueuse de l’enfant, allant à contre-courant de la majorité donc.
Ce parent devra dépasser les remarques de la majorité qui lui diront qu’il est trop laxiste.
Il devra dépasser aussi certaines assertions du monde de la parentalité « bienveillante » qui pourront pour certaines pendant un temps questionner (« une crise bien accompagnée ne dure pas longtemps »,  » les gens verront d’eux-mêmes avec le temps les bienfaits de votre démarche éducative sur votre enfant  » ), pour d’autres faire mal ou franchement agacer (« un enfant qui commet des violences est forcément un enfant violenté  » , « les diagnostics sont des étiquettes à la mode qui enferment les enfants dans des cases »).

Être parent d’un enfant différent, c’est souvent devoir préparer/millimétrer chaque sortie, la logistique étant encore plus complexe et essentielle que pour les autres enfants. Ce qui représente de la charge mentale supplémentaire, parfois du stress supplémentaire. C’est parfois aussi renoncer à certaines sorties avec son enfant : s’il n’y a pas d’aménagements possibles pour répondre à ses besoins particuliers, la sortie risquerait de mal tourner et de le mettre en souffrance. Cela peut vite devenir ingérable pour tous.

Être parent d’un enfant différent, c’est aussi parfois s’isoler volontairement, dans les périodes où le regard des autres est trop difficile à gérer/supporter, et où le parent préfère conserver le peu d’énergie qui lui reste pour accompagner son enfant. Avec le temps, c’est apprendre à faire un tri dans ses fréquentations, pour se protéger et protéger son enfant.

Être parent d’un enfant différent, c’est vivre de plein fouet le validisme ambiant, et ressentir le besoin de se battre pour une société plus inclusive, respectueuse des besoins de tous. C’est s’inquiéter pour l’avenir de son enfant dans une telle société. Pourra-t-il prendre sa place ? Être respecté dans ses besoins particuliers ? Pourra-t-il être vraiment lui-même ?

MAIS AUSSI…✨

Être parent d’un enfant différent, cela peut être un jour de ressentir de la douleur d’observer son enfant en grande difficulté pour des choses qui semblent si simples et naturelles pour les autres enfants, et le jour suivant s’entendre dire que son enfant est incroyablement doué pour telle ou telle chose et qu’il a bluffé tout le monde. Ou de se retrouver complètement scotché face à son esprit atypique, voire à ses capacités hors normes.
Et d’en conclure qu’il n’y a décidément pas de « mieux » ou de « moins bien », juste des fonctionnements différents !

Être parent d’un enfant différent, c’est être challengé comme jamais, être amené à remettre en question tout ce que l’on pensait savoir, devoir s’adapter en permanence, se dépasser, apprendre beaucoup et du coup grandir, grandir tellement…

C’est apprendre à poser un nouveau et merveilleux regard sur le monde, sur la vie.
C’est faire des choses que l’on n’aurait jamais pensé faire, apprécier des choses que l’on aurait jamais su apprécier…
C’est apprendre à savourer les petits bonheurs, les petites victoires, à relativiser beaucoup de choses. C’est aussi prendre conscience de tous les merveilleux moments que l’on vit et que l’on ne pourrait pas vivre sans cette différence de notre enfant.
C’est apprendre à sortir du jugement envers les autres parents, là où l’on aurait pu leur faire porter la responsabilité de certains actes ou incapacités de leurs enfants. C’est aussi apprendre à lâcher prise face aux maladresses des autres.
C’est être amené à travailler sur soi, à déconstruire pour mieux reconstruire…
C’est aussi apprendre à prendre confiance dans sa capacité à accompagner son enfant malgré tous les défis que cela comporte. Se rendre compte que l’on a accompli des choses que l’on n’aurait jamais cru être capable d’accomplir. Et du coup, prendre confiance dans sa capacité à surmonter les autres défis de la vie !

C’est enrichissant, tellement enrichissant !

Être parent d’un enfant différent, c’est (pour beaucoup) ressentir de la gratitude pour tout ce que cette différence nous apporte, au delà de tous les défis qu’elle apporte aussi.
C’est apprendre au fil du temps à voir cette différence comme un cadeau, un magnifique cadeau de la vie.

C’est aussi ressentir une gratitude infinie pour toutes les personnes réellement soutenantes que l’on rencontrera sur notre chemin, qui sauront aider notre enfant, voir le meilleur en lui, le comprendre vraiment et l’accepter tel qu’il est. (Et ce sentiment-là, qui met les larmes aux yeux, il est merveilleux et précieux !)

Tout ça je le sais, car c’est ce que je vis avec mon P’tit Loup. Après des années de doutes, de bouleversements, de remises en question, d’incompréhensions de notre part, nous avons reçu il y a un peu plus d’1 an son diagnostic TSA (Trouble du Spectre Autistique).

Alors les pièces de notre puzzle se sont assemblées, les clés de compréhensions nous ont été données, et une nouvelle vie a commencé.

J’étais déjà convaincue qu’accompagner son enfant avec le cœur, le respecter, se connecter à ses besoins profonds, savoir qu’il fait toujours de son mieux et toujours voir le bon en lui était la clé pour entretenir une relation harmonieuse avec lui, et traverser sans dommages les moments plus difficiles. Je suis aujourd’hui convaincue que cette approche a purement et simplement sauvé ma relation avec mon P’tit Loup, et a sauvé notre quotidien, notre vie de famille.
En effet, quand nous étions perdus et sans explications rationnelles face à certains comportements, me focaliser sur l’essentiel à savoir notre lien, mon amour pour mon enfant et ma confiance en lui a permis de maintenir ce lien et de ne pas sombrer dans un cercle vicieux conflictuel.
C’est aussi ce qui m’a amenée à me concentrer sur la recherche des besoins derrière les comportements, ce qui m’a permis de continuer de penser que tous ces comportements devaient avoir des explications logiques, c’était simplement qu’elles nous échappaient encore. Une approche éducative « traditionnelle » nous aurait probablement détournés de la vérité : quand on pense que l’enfant agit par envie de nous embêter, par « caprices », on ne peut se connecter à ses besoins profonds, et comprendre les vraies causes sous-jacentes des comportements est bien plus difficile.

ET ENFIN…

Étant moi-même passée par de grands moments de doute, j’aimerais terminer sur ce qui suit :

À tous les parents d’enfants différents, qui remuent ciel et terre pour leurs enfants et vivent actuellement des moments difficiles :
Vous êtes des Warriors !
Si vous ne recevez pas la reconnaissance que vous méritez, donnez vous vous-même cette reconnaissance.
Les difficultés de vos enfants ne disent rien de vos compétences de parents. Ne laissez jamais personne vous laisser penser le contraire !
Vous avez les ressources en vous pour accompagner votre enfant.
Écoutez-vous, écoutez-le, faites-vous confiance, faites-lui confiance ❤️ Informez-vous encore et toujours,
Entourez-vous et votre enfant de bons professionnels. Entourez-vous de personnes qui comprennent.
Vous allez y arriver ! 💪

De mon côté, le voile est levé et j’en suis très heureuse.

Aujourd’hui, il me tient à cœur de partager davantage sur le thème de l’accompagnement des enfants neuroatypiques, et plus précisément des enfants autistes.

Parce que c’est ça, aussi, ma réalité quotidienne. Et entre mon vécu et mes formations, j’ai tellement à transmettre, et une envie viscérale de le faire ! Je suis d’ailleurs en train de préparer un accompagnement sur cette thématique, pour les mamans qui vivent aussi cette réalité.

Pour partager davantage de contenu sur ce thème qui, j’en ai conscience, ne concerne pas toutes les mamans qui me suivent, j’ai décidé de créer de nouveaux espaces qui lui seront entièrement dédiés :

  • Une Newsletter spécifique à ce thème 
  • Un groupe Facebook : « Mamans conscientes d’enfants autistes ». J’y offrirai régulièrement des Lives autour de l’autisme, ainsi que des posts qui ne seront publiés que sur cet espace.

Si vous êtes concernée ou intéressée par cette thématique, je vous invite à rejoindre ces espaces via le lien ci-dessous :

Je m’inscris à la Newsletter et rejoins le groupe Facebook ! 

Et si vous n’êtes pas concernée, je tiens à préciser que je continuerai à partager également du contenu sur l’accompagnement des enfants et la maternité de manière plus générale.

A bientôt,

Floriane.

Photo de Kate Ter Haar, Licence Creative Common 2.0


7 thoughts on “Être parent d’un enfant « différent »

  1. Nanakie Répondre

    Quel beau texte !
    Je nous reconnais dans certaines phrases, je ne sais pas si mon enfant a des atypismes mais parfois elle est tellement déroutante…
    Courage, lumière et douceur vers vous ♥

    1. Floriane Répondre

      Effectivement atypisme ou non les enfants peuvent être si déroutants !
      Merci beaucoup pour ton doux message ! ♥

  2. Anaïs Répondre

    Bravo pour votre magnifique texte. Oui la complexité de la différence dans un monde où tout doit être cadré. Lorsque les enfants ne rentre pas dans le moule, ils sont montré du doigts et parfois jugé à tort. Mon fils de 11 ans est tda/h avec inattention et hyperactivé, dyslexiques, dysorthographique, dysgraphique et precose (âge mental 16 ans d’après les test). C’est régulièrement des tsunami à la maison avec pour lui des gros moments de fatigue tellement il peut être compliqué de s’adapter au monde et aux rythmes.
    Heureusement que certains professeurs sont à l’écoute et essaye d’aider.
    Je trouve que l’inclusion de ses enfants n’est pas encore suffisante car les enseignants sont souvent mal conseillés ou informés. Ça devrait faire partie de leur formation afin de mieux accueillir tous ses enfants.
    Oui être entouré de « bonne » personnes/professionnelles est essentielle.
    Encore bravo à vous

    1. Floriane Répondre

      Merci beaucoup pour votre témoignage, j’imagine effectivement comme cela ne doit pas être évident, à la maison comme à l’école… Ce type de profil est justement tellement méconnu, comme tu le dis si bien cela devrait faire partie intégrante de la formation d’enseignant… Et quand l’enfant a des facilités intellectuelles, c’est souvent bien compliqué pour les gens de comprendre les autres difficultés puisque « il est intelligent, il comprend tout, il pourrait faire un effort »… J’espère que ses particularités sont bien prises en compte dans son école, encore merci pour ce témoignage !

  3. Magalie moulin Répondre

    Un texte qui me parle tellement, mon fils de deux ans et demi va être diagnostiqué sous peu mais on est déjà certain de son autisme, c’est un gros coup dur, surtout qu’il accumule les soucis de santé et a beaucoup souffert depuis sa naissance.. Si ce n’est pas trop indiscret de quel type d’autisme souffle votre fils? Et quels sont les symptômes qui vous ont alarmés? Mille mercis

  4. Parent d'un enfant différent Répondre

    Criant de vérité tout ces témoignages sur la difficulté d’avoir un enfant différent. Moi même dans la situation, il n’est pas rare d’être face à des situations où les personnes ne comprennent pas nos difficultés… nous sommes pourtant en 2022…

    C@ro.

  5. Carine Martin Répondre

    Merci pour se témoignage, j’ai un adolescent HPI, TDA et TSA, un mélange difficile et souvent déstabilisant. Le plus dur c’est les « conseils » et « remarques » que l’on reçoit de personnes qui n’y connaissent rien,; « oui mais ça se soigne ! » « des crises il en fera toujours, il faut qu’il prenne sur lui ou qu’il apprenne », « tu ne seras pas toujours là pour lui, il doit se débrouiller, si tu le couvais moins ce serait moins grave… »
    Si seulement les gens connaissaient l’impact de toutes ses pathologies sur tous les aspects de sa vie…J’ai tellement envie de hurler face à leur ignorance et prétention. Je me sens souvent seule et incomprise.

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