Mieux comprendre la théorie de l’attachement…
Je vais aborder dans cet article un sujet extrêmement important à mes yeux : il s’agit de la théorie de l’attachement. Lorsque j’ai visionné pour la première fois la conférence de la pédopsychiatre Nicole Guédeney sur le sujet, j’ai été bouleversée. Et je pèse mes mots ! Elle a tant contribué à renforcer mes convictions concernant le maternage proximal et l’éducation bienveillante ! Elle m’a permis d’intellectualiser certaines choses que je ressentais déjà au fond de moi, en tant que maman. Et elle m’a ouvert les yeux sur des choses que je n’aurais probablement pas comprises sans elle. Je l’ai en tête en permanence, et elle m’aide tellement au quotidien à mieux comprendre les réactions de mon fils, avec moi comme avec les autres.
À mon sens, tout parent devrait voir cette conférence. Tous les professionnels de la petite enfance devraient être formés sur cette théorie. Je dirais même qu’elle devrait être enseignée aux futurs parents dans les cours de préparation à la naissance !
Alors, que dit cette fameuse théorie de l’attachement ? Je vais tâcher de la synthétiser le plus clairement possible ici, mais je vous recommande vivement de regarder directement la vidéo de cette formidable conférence de Nicole Guédeney :
Qu’est-ce que la théorie de l’attachement ?
La théorie de l’attachement a été conceptualisée dans les années 1960 par John Bowlby, (psychiatre et psychanalyste américain), le dernier tome de son œuvre datant de 1982. Elle n’est donc pas SI récente, mais est malgré tout grandement méconnue, surtout en France (fort malheureusement !).
Cette théorie est fondée sur les besoins émotionnels du bébé. Elle analyse les mécanismes d’appel à l’aide du bébé pour combler ces besoins, et l’impact que les réponses (ou non réponses) de l’adulte qui s’occupe de lui auront sur leur lien d’attachement à tous les deux, ainsi que sur sa personnalité à moyen et long terme.
Qu’est-ce que l’attachement ?
L’attachement est une dimension (parmi d’autres) du lien affectif avec une personne qui fait qu’en cas de détresse, on recherche d’elle sécurité et proximité.
Nous avons tous des personnes qui sont pour nous des figures d’attachement. Il s’agit de ces quelques personnes de confiance que l’on se sent prêt à appeler lorsque l’on se sent mal et qu’on a besoin de réconfort. Le bébé fonctionne de la même manière : en cas de détresse, il cherche à rétablir la proximité avec une figure d’attachement afin de retrouver paix et sécurité.
Attention, être « attaché » selon la théorie de l’attachement, n’a rien à voir avec l’usage commun que l’on fait de ce mot (« je me suis attachée à cette collègue, dommage qu’elle s’en aille… »). Il s’agit là d’attendre d’une personne sécurité et protection en cas de détresse.
La figure d’attachement protège le bébé, mais c’est le bébé qui « s’attache ». S’attacher signifie « attendre la protection de la part de l’adulte ». Répondre aux besoins d’attachement de son enfant veut dire : « je sais que je dois protéger mon bébé et j’agis en conséquence ».
Notons bien qu’attachement et amour sont deux dimensions bien différentes du lien affectif. Malheureusement, certains parents aiment leur bébé d’un amour véritable, mais pour diverses raisons, ne répondent pas à ses besoins d’attachement.
L’attachement, un système biologiquement programmé qui a permis la survie de notre espèce
Lorsqu’un bébé se sent en situation de détresse, son corps tout entier se met automatiquement en état d’alarme et son système d’attachement s’active. Il va alors chercher de manière tout à fait instinctive à rétablir le lien physique avec l’une de ses figures d’attachement. Pour cela, il va exprimer sa détresse à travers un répertoire de comportements : regard, moue, gémissements, puis pleurs, cris… Un bébé capable de se déplacer va s’en rapprocher de lui-même, voire s’accrocher à elle… Et c’est là que la nature est merveilleusement faite : si le bébé est « programmé » pour manifester son besoin de proximité, l’adulte est lui « programmé » pour y répondre ! En effet, généralement, les cris d’un bébé sont très dérangeants et donnent envie aux adultes (et particulièrement à ses parents) de le consoler au plus vite pour les faire cesser (de même qu’un bébé qui gazouille attendrit l’immense majorité des adultes !)! Alors, l’adulte réconforte le bébé et répond ainsi à son besoin d’attachement. Le bébé, apaisé, ce sent à nouveau en sécurité. Son système d’attachement s’éteint : les comportements appelant à la proximité cessent, et il retourne vaquer à ses occupations. L’état émotionnel de sérénité qu’il retrouve lorsque sa figure d’attachement répond à ce besoin est très particulier, et c’est ce ressenti qu’il cherchera à retrouver la prochaine fois qu’il sera en état d’alarme.
Prenons un exemple concret : un bambin est à l’aire de jeux, et soudain il tombe puis se met à hurler. Sa maman arrive, le prend contre elle, et alors il se calme immédiatement. Certains diront alors : « c’était du cinéma ». Non ! Il était en état d’alarme, son système d’attachement s’est activé et l’a poussé à appeler sa maman, et lorsque la proximité a été rétablie, il s’est tout de suite senti mieux ! Après tout, n’est-ce pas la même chose pour nous, adultes ? Si nous ressentons une forte douleur (jusqu’à une certaine intensité bien sûr) et que notre conjoint est présent et nous manifeste son empathie et son affection, ne nous sentons-nous pas déjà mieux, même si la douleur physique est toujours présente ?
Selon Bowlby, si l’espèce humaine continue de perpétuer ce système d’attachement, c’est que celui-ci contribue à sa survie. Rien que ça ! Autrement dit, le fait que l’enfant manifeste ses besoins d’attachement et que l’adulte y réponde est quelque chose d’absolument nécessaire à son bon développement.
Dès le début de sa vie, toute situation de détresse déclenchera automatiquement chez l’enfant des comportements d’attachement. À partir de 9 mois (âge auquel le bébé se rend compte qu’il est une personne à part entière et commence à différencier le familier de l’inconnu), toute distance supérieure à celle qu’il est capable de supporter de sa figure d’attachement déclenchera automatiquement chez lui des comportements visant à rétablir la proximité.
C’est pour cela qu’à cet âge, il commence à crier frénétiquement dans les bras des personnes qu’il connait peu et demande expressément à retrouver ceux de sa maman ou son papa, alors qu’avant il passait de bras en bras sans aucun problème. Vous savez, la fameuse angoisse de la séparation ! Avec le temps, il apprendra à ré-apprivoiser sa mamie/son papi et autres personnes de son entourage qu’il ne voit pas tous les jours. Un enfant de 3 ans leur sautera dans les bras, même s’il ne les a pas vus depuis 1 mois. Mais pour un bébé de 9 mois, c’est tout simplement impossible : il se sent en insécurité face à des personnes qu’il connait peu, et alors se replie automatiquement vers sa figure d’attachement. Il convient de respecter ce besoin dans ces moments-là (on évite le fameux « allez, fais pas ta timide, va dans les bras de papi ! »).
Ce degré de tolérance du bébé à la séparation de sa figure d’attachement varie en fonction des circonstances. Nicole Guédeney donne l’exemple d’un bébé de 10 mois qui irait à la crèche sans soucis d’ordinaire mais qui, le jour où sa dent perce, refuse la séparation et s’accroche à sa maman… La douleur qu’il ressent active son état d’alarme et donc son attachement, et la séparation qu’il pouvait supporter la veille lui devient alors intolérable…
Qui sont les figures d’attachement du bébé ?
Les figures d’attachement sont les personnes qui élèvent l’enfant. En général, il s’agit de la maman, du papa, et des substituts parentaux des modes de garde. Le bébé hiérarchise ces figures d’attachement en fonction du lien spécifique qu’il créé avec chacune d’elle. L’une se détache au-dessus de toutes : on l’appelle la « figure d’attachement principale ». Il s’agit de la personne qui s’est occupée le plus souvent et le plus durablement de lui durant les premiers mois de sa vie. En général, il s’agit de la maman. Mais si, par exemple, le papa s’occupe davantage du bébé que de la maman lors des premiers mois, alors dans ce cas il s’agira du papa. Un bébé ne peut avoir qu’un nombre limité de figures d’attachement. Chacune d’elle se construit spécifiquement lors des 9 premiers mois de sa vie, et par la suite, chacune de ces figures est irremplaçable, spécifique, et non interchangeable.
C’est de sa figure d’attachement principale que le bébé attend le plus de sécurité, et c’est elle qui est capable de lui en donner le plus. C’est un point très important à comprendre à mon sens, puisqu’il explique beaucoup de comportements de bébés ou bambins que l’on interprète souvent mal. Vous les mamans, avez-vous déjà eu l’impression que votre enfant était plus facile avec les autres qu’avec vous ? Si oui vous avez peut-être, de ce fait, douté de vos capacités de mère en vous disant que les autres s’y prenaient probablement mieux que vous avec votre enfant. Peut-être même avez-vous dû affronter des remarques très blessantes à ce sujet : « avec moi, il n’y a pas de problème », « il doit sentir que toi tu laisses tout passer », etc. Et bien, rassurez-vous ! Si votre enfant se comporte différemment avec vous, c’est simplement parce que vous êtes sa figure d’attachement principale. Autrement dit, vous êtes sa source d’amour inconditionnel, et c’est avec vous qu’il ose manifester les émotions négatives qu’il retient avec les autres. Il s’agit là aussi d’un comportement instinctif : on est sur la réserve et on se « tient à carreaux » avec les personnes qu’on ne connait pas ou peu, lorsqu’on ne se sent pas en confiance (ou sinon, dans la nature, quelles pourraient être les conséquences ?), et on se « décharge » auprès de la personne dont on sait qu’elle continuera de nous aimer quoiqu’il arrive. Voici des exemples typiques : une maman dépose son enfant à la crèche, tout se passe merveilleusement bien en son absence, et à son retour, il fait une crise monumentale et refuse de monter dans son siège auto. Il faut bien comprendre que le siège auto, dans cette situation, n’est qu’un prétexte, une occasion pour l’enfant « d’exploser » auprès de sa source de sécurité. Il est soulagé de retrouver sa maman, et décharge auprès d’elle les tensions qu’il a accumulées tout au long de sa journée. Si votre enfant est plus difficile avec vous qu’avec les autres, c’est qu’il se sent en confiance avec vous et que justement, votre relation va bien ! 🙂 (Finalement, nous adultes fonctionnons de la même manière : qui n’a jamais « éclaté » auprès de son pauvre conjoint innocent après une dure journée de travail ? 😉 )
Par ailleurs, cette hiérarchisation des figures d’attachement explique aussi pourquoi le bébé va très souvent, lorsqu’il est mal, refuser catégoriquement les bras de son papa et ne se calmer que dans les bras de sa maman. Combien de témoignages de mamans déboussolées par ces comportements ai-je pu lire sur la toile ! Oui, ce peut être difficile : pour la maman, qui ressent sur ses épaules un poids immense (« lorsque je suis là, je suis la seule à pouvoir calmer mon bébé ») et peut se sentir prisonnière de tant de responsabilités. Pour le papa, qui peut se sentir impuissant, se remettre en question en tant que père, vivre la situation comme un rejet pur de son enfant, voire accuser la maman d’avoir créé trop de proximité avec l’enfant sans lui laisser de place. Il est très important de comprendre et de se rappeler de cette chose essentielle : l’attachement n’a rien à voir avec l’amour. Oui, si la maman est la figure d’attachement principale, c’est vers elle que le bébé se tournera en cas de détresse pour chercher du réconfort, c’est elle qui sera la plus apte à le consoler. Mais non, cela ne veut pas dire qu’il l’aime davantage que son papa qu’il rejette à ce moment-là. Il s’agit là de mécanismes instinctifs de survie : en situation d’alarme, si trois figures d’attachement sont présentes, le bébé se tournera de manière automatique vers sa figure d’attachement principale. Par contre, admettons que uniquement papa et nounou soient là, le bébé se tournera alors de suite vers son papa (en admettant qu’il soit la seconde figure d’attachement). C’est dans un souci d’efficacité et de survie que la nature a prévu cela : dans une situation d’urgence, si le bébé devait réfléchir « alors, aujourd’hui, je choisis d’appeler papa, maman ou nounou ? », il ne ferait pas long feu ! En cas de danger immédiat, il n’y a pas le temps de penser…
Comment créer avec son bébé un lien d’attachement fort et sécurisé ?
Certaines conditions sont nécessaires pour que l’enfant constitue des figures d’attachement avec qui il se sente en confiance et en sécurité :
- Des expériences répétées de réponses adéquates aux besoins d’attachement du bébé: il saute ici aux yeux que les professionnels qui recommandent aux parents de laisser pleurer leurs bébés sont dans l’erreur la plus totale ! Il est au contraire important de répondre rapidement aux pleurs de son bébé, à chaque fois. Pour les bébés plus grands et les bambins, d’accompagner leurs tempêtes émotionnelles avec écoute, calme, empathie (tant que possible bien sûr, je ne dis absolument pas que, parce qu’une fois vous avez craqué, tout est foutu 😉 ).
- La continuité des personnes qui s’occupent de lui : le bébé a besoin de stabilité. Si les personnes s’occupant de lui changent tout le temps, il pourra s’en trouver insécurisé et ne parviendra pas à créer de lien d’attachement avec elles. Il est donc préférable, quand c’est possible, de choisir un mode de garde qui limite les rotations de personnel (une bonne nounou étant idéale à mon sens), d’essayer de confier son enfant toujours à la même/aux mêmes personne(s) en cas d’absences ponctuelles (mieux vaut éviter d’avoir recours de manière répétée à des baby-sitters d’un soir), etc.
- La prévisibilité et la cohérence de leurs réponses à ses appels : si ses figures d’attachement répondent à ses appels parfois mais pas toujours, le bébé ne sait plus s’il peut compter sur elles en cas de détresse.
- Des séparations limitées en fonction de l’âge de l’enfant : là encore, attention aux conseils de l’entourage qui souvent encouragent la séparation précoce parents/bébé. Toute séparation doit être pesée, mesurée, réfléchie. Dans les toutes premières années de vie, moins il y en a et moins elles sont longues, mieux c’est. Bien sûr qu’elles sont parfois nécessaires pour l’équilibre, qu’on peut avoir besoin souffler et de se retrouver en couple, mais il s’agit d’être mesuré et raisonnable : aux 6 mois du bébé, si l’on souhaite partir à deux, il sera largement préférable de le faire sur une journée plutôt que sur une semaine…
Parce qu’elles permettent une grande proximité et une réponse casi-immédiate aux signaux d’appel du bébé, les pratiques du maternage proximal (telles que l’allaitement, le cododo ou encore le portage) favorisent un lien d’attachement fort (je ne dis pas non plus que ce sont des conditions indispensables, bien entendu).
En quoi l’attachement est-il un tremplin vers l’exploration et l’autonomie ?
« L’attachement, bien loin d’interférer avec l’exploration, la stimule »
Nicole Guédeney
Le bébé est poussé par une force intérieure très vive à découvrir le monde qui l’entoure : c’est un petit explorateur ! Ses élans curiosité naturels lui permettent d’apprendre, de comprendre son environnement.
Mais la nature est bien faite : le bébé est poussé à explorer, mais à une distance raisonnable vis-à-vis de sa figure d’attachement. C’est-à-dire qu’une fois qu’il se déplace et crapahute partout pour découvrir le monde, il reste dans une sorte de périmètre de sécurité en fonction de la distance maximale qu’il est capable de tolérer vis-à-vis de sa figure d’attachement. Et, magie de la nature, la figure d’attachement (notamment la maman) possède elle aussi une sorte de « radar » qui la pousse à maintenir le contact avec l’enfant. Le Dr Gonzales souligne que parfois, la distance maximale que tolère la maman est inférieure à celle que tolère le bébé, et qu’il est alors amusant d’observer ces couples maman/bébé à l’aire de jeu qui se lancent dans une sorte de « course poursuite » : le bébé ou le bambin s’éloigne, la maman se rapproche en soupirant (quel imprudent, je vais le perdre de vue !), et le petit s’éloigne encore, au grand désespoir de sa maman. Mais c’est justement parce que sa maman s’est rapprochée de lui que l’enfant s’est permis de s’éloigner davantage ! 🙂 Ce mécanisme permet au bébé de rester en sécurité : s’il pouvait supporter une distance très lointaine de sa figure d’attachement, ses élans d’explorateurs risqueraient de le perdre ! Il s’agit là d’une formidable protection !
Le bébé est donc un explorateur, mais un explorateur prudent. La figure d’attachement principale est pour lui sa base d’exploration : s’il sent qu’il peut s’y replier en cas de problème, alors il se sentira suffisamment en confiance pour explorer le monde. En cas de détresse, il ira aussitôt chercher sécurité et réconfort auprès d’elle. Une fois le calme retrouvé, il repartira de plus belle. Isabelle Filliozat donne l’image du porte-avion : la maman est au bébé le porte-avion qui lui permet de se poser avant de repartir pour de nouvelles aventures !
Ce phénomène se met en place entre les 9 et 12 mois du bébé : à partir de cet âge, il résiste aux séparations de sa figure d’attachement, l’appelle pour rétablir la proximité lorsqu’il est en état d’alarme, l’utilise comme une base pour explorer, et se tourne vers elle pour rechercher réconfort et soutien.
Je constate au quotidien à quel point ces affirmations se vérifient dans le comportement de mon P’tit Loup de 2 ans. Lorsque nous sommes à l’air de jeu par exemple, je le vois s’éloigner, confiant, avide de nouvelles découvertes. Et puis, il peut arriver qu’un enfant plus grand le bouscule, qu’il tombe, ou encore qu’un chien lui fasse peur. Il court alors aussitôt vers moi et demande de la proximité (un câlin, voire une tétée si les émotions ont vraiment été trop fortes pour lui). Nous prenons le temps nécessaire, puis en général, d’un coup, il se redresse et repart s’amuser aussi sec ! D’après la théorie de l’attachement, il a régulé son état d’alarme auprès de moi, et il est à nouveau opérationnel pour faire de nouvelles expériences ! Parfois, j’observe malheureusement des parents qui vont refuser ces demandes d’affection de leur bambin (« il fait un caprice »), et alors forcément, le petit s’accroche encore plus ! Si seulement ils savaient que dans ces situations, ils leurs suffiraient simplement de donner à leur enfant l’affection qu’il demande…
Pour reprendre les mots de Bowlby :
« Ce n’est que lorsque les besoins d’attachements sont satisfaits que le jeune enfant peut s’éloigner en toute sécurité de sa figure d’attachement pour explorer le monde qui l’entoure. »
« La confiance dans disponibilité de la figure d’attachement constitue une sorte de tremplin pour affronter les « challenges » et permet le développement d’une vraie autonomie ».
« La vraie autonomie, c’est savoir ce qu’on peut faire tout seul, mais savoir aussi quand on a besoin d’aide. »
C’est donc en répondant aux besoins affectifs du petit enfant qu’on l’aide à prendre son envol. Absolument pas en le poussant du haut d’une tour avec comme espoir que d’un coup, n’ayant pas d’autre choix, il vole de ses propres ailes ! 😉 Vouloir forcer l’autonomie à tous prix en laissant pleurer un bébé pour qu’il arrête d’appeler la nuit ou en refusant les demandes d’affection d’un bambin constitue en ce sens de grandes erreurs. Ces enfants cesseront peut-être d’appeler par démission, et non parce qu’ils se sentent capables d’affronter ces épreuves seuls. Ce n’est en rien un signe d’autonomie !
L’autonomie, la vraie, celle qui permet de se détacher de manière saine et sereine, s’acquiert dans le temps, lorsque l’enfant s’y sent prêt. Elle s’acquiert grâce à une solide base de sécurité qui lui donne confiance en lui et en l’autre.
Voilà pourquoi je pense qu’il est si important pour nous parents de connaître la théorie de l’attachement. Elle nous enseigne que de répondre à tous les pleurs et appels de nos bébés/bambin ne va pas les rendre plus dépendants de nous, mais va au contraire leur donner une base solide de sécurité qui leur permettra de s’ouvrir au monde et de devenir plus autonomes. Plus l’enfant se sent en confiance, plus il trouve en lui les ressources pour s’éloigner de sa figure d’attachement. Parce qu’il sait qu’en cas de besoin, elle sera là pour lui.
S’attacher pour mieux se détacher, voilà ce dont il s’agit ! Comme le dit Isabelle Filliozat, « l’amour n’est pas une récompense, c’est un carburant » ! Ce dont nos bébés/bambins ont besoin pour grandir et devenir autonomes, c’est avant tout de notre amour inconditionnel ! À partir de là, ils seront capable de la prendre, leur indépendance. Le fait que si on les laisse faire, les bambins arrêtent d’eux-mêmes de téter un jour ou l’autre n’en est-il pas une belle preuve ? Vouloir forcer l’autonomie à tout prix en refusant les demandes d’affection de l’enfant est totalement contreproductif : cela abime le lien d’attachement, et un enfant dont le lien d’attachement est insécurisé aura plus de mal à se séparer sur le long terme. Bowlby explique qu’à l’âge de 7-8 ans, tous les enfants n’ont pas la même capacité à se détacher sereinement de leur figure d’attachement, et que ceux ayant plus de mal sont justement ceux dont les besoins d’attachement ont été insuffisamment comblés durant la petite enfance.
Le rôle du « care-giver »
Je ne suis pas favorable à l’utilisation des mots anglais, mais N. Guédeney explique que ce mot est intraduisible !
Dans la théorie de l’attachement, donner le « care-giving » signifie : donner des soins au bébé dans la dimension de l’attachement. Cela implique d’être attentif aux signaux verbaux et non verbaux du bébé, et d’être sensible à ses besoins d’attachement et d’exploration.
En situation particulière de détresse, cela veut dire :
- Être sensible à la détresse du bébé : « mon chéri, tu n’as pas l’air bien ».
- Manifester son empathie : « Je comprends ton émotion même si je ne la ressens pas, et je vais pouvoir t’aider à la surmonter. » (« Oh, c’est parce que j’ai quitté la pièce sans te prévenir ? Oh oui, tu as dû te sentir seul d’un coup ! Et tout triste ! C’est difficile ça ! »)
- Chercher des solutions qui vont l’aider à s’apaiser, et les lui communiquer : « Viens mon cœur, est-ce que tu aimerais un câlin, ou que nous lisions un livre ensemble ? ».
- En cas de mauvaises interprétations (car cela peut arriver !), chercher à rectifier le tir.
En procédant ainsi, non seulement on aide l’enfant à retrouver le contrôle de ses émotions, mais en plus on lui enseigne des compétences fondamentales : on lui apprend qu’il est possible de contrôler ses émotions négatives. On lui permet de comprendre que son comportement est une manière de nous communiquer ce qu’il ressent en lui, et que nous pouvons partager ce ressenti avec lui. (Notons que cela rejoint tout à fait les découvertes en neuroscience dont nous fait part le Dr Gueguen dans ses livres Pour une enfance heureuse et Vivre heureux avec son enfant).
Ce point est fondamental, car le bébé seul NE PEUT PAS réguler ses émotions négatives comme la tristesse, la peur ou la colère. Il a besoin de l’adulte pour se calmer, et c’est ainsi qu’il apprendra petit à petit à les réguler.
Si l’adulte ne répond pas lorsqu’il se trouve en situation de détresse, alors le bébé adoptera des stratégies adaptatives. Il est tellement immature et dépendant qu’il y est contraint : il a besoin de lien avec ses figures d’attachement. Si quand il est joyeux tout va bien, mais qu’à chaque fois qu’il exprime une émotion négative, on l’ignore, on le réprimande, on lui demande de se taire, alors il finira par prendre sur lui pour maintenir le lien et la proximité avec ses figures d’attachement : « je ne manifeste pas, je ne demande pas, et je ne perçois pas en moi-même tout ce qui est de l’ordre des émotions négatives ». Par contre, son corps, lui, les perçoit, et bien sûr le stress ressenti est maximal ! Au regard de l’apprentissage de l’écoute et de la régulation de ses propres émotions négatives, c’est catastrophique ! (Et c’est sans parler des effets néfastes du cortisol sur son cerveau encore immature, que j’avais déjà évoqués ici).
Dans certains cas, les figures d’attachement répondent parfois, mais pas toujours. En conséquence, il arrive que le bébé appelle plus fort pour maximiser ses chances d’obtenir une réponse. Si la figure d’attachement tarde à venir, il lui manifestera toute sa colère lorsqu’elle arrivera enfin !
L’impact de l’attachement à long terme
Le bébé construit à partir de l’âge d’1 an un modèle des autres et de soi en situation de détresse.
Si à chaque fois qu’il a besoin d’aide, on lui répond avec empathie et de manière sécurisante, il développe plusieurs certitudes :
- Il peut compter sur l’autre en cas de problème.
- Il a de la valeur au regard de l’autre, même en situation de détresse.
- Il a un impact sur l’autre.
De plus, il intègre en lui ces modèles d’interactions positives et sera capable de les reproduire plus tard, avec les autres ! 🙂
Un attachement sécurisé permet donc, à plus long terme, d’avoir confiance en soi et en l’autre, à mieux réguler son stress, et en ce sens constitue un formidable tremplin pour affronter les situations difficiles de la vie. Il permet aussi un meilleur contrôle des émotions négatives, un plus grand sens de l’empathie, et en ce sens contribue à de meilleures relations sociales, et une plus grande capacité à gérer les situations conflictuelles.
Au contraire, un attachement non sécurisé pourra avoir diverses conséquences à moyen et long terme. C’est un facteur de risques qui associés à d’autres, peut entraîner des troubles du comportement chez l’enfant, mais aussi chez l’adulte qu’il deviendra. À titre indicatif, 80% des sujets dans les populations cliniques psychiatriques d’enfants/adolescents ont des attachements non sécurisés.
Si l’enfant grandit dans un climat d’hostilités et de conflits, où les émotions négatives ne sont pas permises, alors il intègrera ces modèles dans ses relations sociales avec les autres plus tard. Nicole Guédeney donne l’exemple d’un enfant de 3 ans qu’elle a observé taper un autre enfant venu près de lui avec un ballon. Lorsqu’on lui a demandé pourquoi, il a répondu : « il est venu avec son ballon, donc c’était un ennemi ! ». La conclusion de N. Guédeney est que cet enfant n’a pas dû vivre beaucoup de relations sécurisantes pour que lorsque quelqu’un vienne près de lui, il le perçoive aussitôt comme une menace.
En cas de problèmes de comportement chez l’enfant, connaître la théorie de l’attachement peut permettre d’intervenir à temps de manière efficace, plutôt que de tout mettre sur le compte du tempérament ou des gènes.
Un attachement non sécurisé ou peu sécurisé n’aura pas nécessairement comme conséquences des troubles comportementaux. Cependant, notre histoire d’attachement influence grandement notre personnalité.
Nicole Guédeney nous invite à nous poser les questions suivantes :
- Avons-nous une bonne estime de nous-même ?
- Si elle est bonne, est-elle bonne uniquement lorsque nous avons réussi, ou même en situation d’échec ?
- Est-elle bonne sous le regard de n’importe qui, ou uniquement sous certains regards ?
La manière dont nous répondons à ces questions a probablement à voir avec notre propre histoire d’attachement, construite depuis notre petite enfance.
Bowlby classe les différents schémas de comportements liés à l’histoire d’attachement de la manière suivante :
1 . Modèle « secure » (attachement sécurisé)
« Cela ne va pas. J’ai le droit de ressentir que cela ne va pas. Je vaux la peine d’aller mieux. Je peux supporter de chercher pourquoi je souffre. Il existe des personnes à l’extérieur qui pourront supporter de me voir allant mal ou vulnérable, ou dans le besoin de réconfort ou d’aide, sans indifférence, ni rejet ni rétorsion. Ce sera moins difficile si j’ai cette aide pour explorer pourquoi je vais mal, et pour trouver des solutions. »
- Modèle insecure évitant(attachement non sécurisé):
« Je ne ressens jamais la tristesse. Je cherche à me débrouiller par moi-même, car je ne peux pas compter sur l’autre. Je porte mon attention sur tout ce qui m’éloigne de la perception de ma détresse. Je ne demande jamais rien, je ne compte que sur moi-même. »
- Modèle insecure résistant/ambivalent (attachement non sécurisé):
« Je ne sais jamais si je peux compter sur les autres. Ils sont tellement imprévisibles, et donc décevants. Je me sens tellement dans le besoin des autres et tellement en colère contre eux de ce qu’ils m’affligent comme déception. Je me concentre seulement sur la manière dont je peux attirer leur attention, mais je n’ai plus de disponibilité pour explorer, et je sais que je ne peux rien faire par moi-même. »
Mon ressenti
Comme je l’ai dit, lorsque j’ai pris connaissance pour la première fois de la théorie de l’attachement lorsque mon fils était encore un petit bébé, j’ai été bouleversée. Bouleversée, et aussi consternée et en colère. En colère de penser que depuis le temps que cette théorie détenant des informations capitales pour le bien-être de l’enfant et le bon développement de sa personnalité est accessible (les années 60, cela ne date pas d’hier tout de même !), à laquelle on peut ajouter les découvertes récentes en neurosciences affectives qui ne viennent que la conforter, on continue de traiter les enfants comme on le fait en France : punitions/isolements/cris et autres violences éducatives dans les écoles, répression des émotions (et rappelons que le conseil constitutionnel a refusé l’article de loi visant à interdire les violences éducatives !). Que l’on continue de qualifier leurs besoins de « caprices », que l’on maintienne une durée de congé de maternité aussi ridicule, que l’on fasse machine arrière concernant le congé parental, que l’on n’investisse pas davantage dans les crèches pour améliorer le ratio enfants/auxiliaires (sérieusement, 1 pour 5 à 1 pour 8 pour les bébés, est-ce normal ?!), que l’on perpétue cette image de mère poule possessive et étouffante à la maman qui choisit de s’occuper de son petit enfant à temps plein, que l’on pousse toujours plus la séparation précoce maman/bébé « au risque qu’il ne parvienne pas à se détacher », que l’on demande aux parents de laisser pleurer leurs bébés et de ne pas « céder » à toutes les demandes affectives de leurs bambins « pour qu’ils deviennent plus autonomes » (quel comble !), et j’en passe ! Je rêverais d’une société où tous les professionnels de la petite enfance auraient connaissance de la théorie de l’attachement et aient à cœur de faire tout leur possible pour respecter les besoins d’attachement des petits enfants. Dans sa conférence, Nicole Guédeney déplore ce décalage entre l’acquisition de nombreuses connaissances sur les besoins des bébés et l’absence totale de moyens mis en place pour y répondre. Voici ces mots auxquelles j’adhère à 100% :
« Dans notre contexte actuel, nous n’avons jamais autant parlé des besoins des bébés et des enfants, et nous n’y avons jamais aussi peu répondu. »
« Il n’y a pas à notre époque de manière aussi généralisée une organisation aussi délibérée de ne pas donner une continuité relationnelle suffisante qui respecte les besoins du bébé dans nos sociétés occidentales. »
« Il n’y a jamais eu de période où l’on a aussi peu soutenu ceux qui sont responsables d’élever les bébés. »
La note d’espoir je trouve, c’est qu’elle explique que dans de nombreux pays, les choses ont changé : la théorie de l’attachement a révolutionné les pratiques du milieu de la petite enfance. À quand notre tour ???
Sources et références :
Conférence de Nicole Guédeney sur la théorie de l’attachement
Serre moi fort, Carlos Gonzales, Editions du Hêtre, 2013, p 51 à 54
Crédit photo :
Morgane 8 juin 2017
merci pour cet article ! Moi aussi j’aimerais tellement que tout le monde connaisse cette théorie de l’attachement !
D’ailleurs j’ai une petite interrogation à ce sujet à propos de laquelle je n’ai pas encore pris le temps de me renseigner, je ne sais pas si tu auras la réponse mais je tente quand même 🙂 Mon fils va à la crèche depuis ses 9 mois, au départ la séparation est difficile mais après quelques semaines d’adaptation et en passant de mes bras aux bras de l’auxiliaire il n’y a plus de problème par contre le midi quand je vais le voir pour la tétée ou le soir quand je viens le chercher c’est comme si je n’étais pas là ! Du coup je le laisse finir ce qu’il faisait pendant qu’on me donne les transmissions mais je pense qu’il pourrait y rester toute la soirée si je ne finissais pas par le prendre dans mes bras… pourquoi il s’en fiche tellement que je sois là ???
Floriane 9 juin 2017
J’ai surtout l’impression qu’il se plait bien à la crèche ! 🙂 Le fait qu’il ait manifesté lors des débuts à 9 mois qu’il ne voulait pas se séparer de toi témoigne d’un lien d’attachement fort entre vous. De toutes façons, il me suffit de lire ton blog et ta page pour en être convaincue 😉 . À cet âge, les enfants peuvent être totalement absorbés dans leurs tâches/activités si elles répondent à leurs besoins intérieurs du moment. Maria Montessori parle de « l’esprit absorbant », d’activités constructrices, de concentration intense… Dans son livre « L’enfant », je me souviens qu’elle parle d’une petite fille tellement absorbée dans une activité et concentrée qu’elle ne s’est même pas rendue compte qu’on déplaçait la chaise sur laquelle elle était assise pendant qu’elle travaillait.
À mon avis, la situation aurait plus à voir avec ça, qu’en penses-tu ? Ca voudrait juste dire que : 1/ il est à l’aise à la crèche
2/ votre lien d’attachement fort lui permet justement de se détacher de toi sereinement quand tout va bien, il devient plus indépendant…
3/ ils ont à la crèche des jeux tout à fait adaptés aux besoins des enfants et à ses besoins à lui 🙂
Ca me fait penser à mon P’tit Loup qui, la dernière fois que nous sommes allés à notre espace de jeux parents/bébés, avait du mal à décoller. Pareil, il aurait pu rester encore jouer des heures, et je t’assures qu’il ne me calculait pas du tout ;). Je l’ai interprété comme un signe de prise d’indépendance et de grande confiance en lui (que du positif je pense ! 🙂 ).
(Alors qu’il a eu des périodes où dans ce même espace de jeu, je ne pouvais pas m’éloigner sans qu’il m’appelle, comme quoi tout évolue avec l’âge…)
unemamanparmidautres 10 juin 2017
Merci pour cet article qui est à la fois plein de bienveillance et angoissant pour moi…
Ma fille de 2 ans et 3 mois très très proche de moi. Je m’occupe d’elle exclusivement depuis sa naissance, après une grosse et un accouchement difficiles (prématurité, séparation, soins intensifs…)
Depuis qu’elle a environ 7-8 mois (période de la fameuse angoisse de séparation), j’ai vu son comportement changer avec moi. J’ai compris qu’elle avait besoin d’entre sécurisée et rassurée, ce que j’essaye de faire au mieux, jour et nuit.
Et c’est là que je veux en venir, le sommeil est quelque chose de très compliqué depuis sa naissance, avec des petites phases d’accalmie, et beaucoup de phases où on a un peu tout essayé (câlins, rituel, mots, bercée à bras puis posée dans son lit, matelas au sol pour rester près d’elle jusqu’à ce qu’elle s’endorme, et ça plusieurs fois entre le coucher et la nuit…) (je n’arrive pas à me résoudre à la laisser pleurer même si j’ai essayé quelques minutes, certainement de trop,mais c’est tellement épuisant…).
Finalement, la solution qui est arrivée alors que j’étais à bout de force, c’est de la prendre avec nous pour dormir. On doit donc rester avec elle dans le lit jusqu’à ce qu’elle s’endorme et le refaire si elle se réveille entre temps (ou si on l’a couchée dans son lit). Elle se calme quand on est couché avec elle, mais si elle se réveille et qu’elle est seule, à la sieste comme dans la nuit, elle fait d’énormes crises (je n’entends pas par là des caprices, j’entends des crises comme des angoisses).
Je suis désolée pour le pavé, mais je ne sais plus quoi faire, prise entre l’amour que j’éprouve pour elle, le besoin d’être là, et le sentiment d’être étouffée, de souffrir de cette situation…
Penses-tu pouvoir expliquer tout ça ?
Floriane 11 juin 2017
Je te comprends tout à fait puisque le comportement de ta fille me rappelle celui de mon fils qui a le même âge. Nous l’avons toujours accompagné dans le sommeil jour et nuit, et comme ta fille il a besoin de notre présence pour s’endormir et se rendormir. En fait à cet âge, c’est tout à fait normal, c’est encore le cas de nombreux enfants, mais c’est vrai que c’est fatiguant pour nous parents…
Ici, il était en cododo et a rejoint sa chambre autour de ses 9 mois. Il dormait sur un grand matelas au sol, et je le rejoignais au premier réveil (jamais très tard) pour finir la nuit avec lui. Lorsqu’il a eu 18 mois, la situation de nous convenait plus (je le rejoignais tôt donc je passais peu de temps avec mon conjoint), cela durait plus longtemps que nous ne l’aurions pensé… Et surtout, mon P’tit Loup a traversé une nouvelle période d’angoisse de la séparation où il ne voulait plus du tout aller se coucher dans sa chambre. Nous le prenions donc dans notre lit dès le début de la nuit, et nous avons remarqué que comme ça, il nous faisait de super nuits ! Du coup, après réflexion, nous avons ré-amenagé la chambre pour nous y installer tous les trois. Nous avons notre grand lit parental, auquel est accolé le petit lit de mon P’tit Loup : il est à notre hauteur, tout près, mais nous avons notre espace tout de même et chacun a sa surface. Nous sommes très contents de cet aménagement ! Mon P’tit Loup fait de belles nuits de 10-12 heures sans aucun réveil. Pour autant, je suis sûre que s’il dormait seul dans une autre chambre il se réveillerait pour nous appeler. Je pense qu’il a encore besoin de nous sentir près de nous. Nous avons lâché prise et fait le choix de le laisser partir dans sa chambre quand il s’en sentira prêt.
Je ne sais pas si c’est quelque chose qui pourrait vous convenir, mais peut-être une piste ? Le fait de coller les matelas et de retrouver l’espace complet d’un lit de place juste pour les parents fait du bien je trouve (plutôt que d’avoir bébé entre les 2).
Finalement, je trouve que lorsque le cododo est totalement assumé et sans attentes envers l’enfant, ça se passe tellement mieux (pour nous en tous cas). Je trouve que c’est un bon compromis pour satisfaire au mieux les besoins de tout le monde (enfant rassuré, parents plus reposés puisque c’est tellement moins fatiguant…).
Nous l’accompagnons toujours dans le sommeil. Mais il dort beaucoup mieux, et si pour une raison ou pour une autre il se réveille la nuit de manière exceptionnelle, j’interviens sans me réveiller complètement et du coup je ne suis pas trop fatiguée le lendemain.
En tous cas, je crois que la patience est toujours payante. A un moment donné, je me demandais si mon P’tit Loup allait arrêter ses tétées nocturnes de lui même un jour, et oui il l’a fait… Courage, ils finissent toujours par dormir, et je suis convaincue que plus on les accompagne maintenant qu’ils sont tout petits, mieux ils dormiront (d’un sommeil paisible et serein) plus tard. 😉 Encore courage !
unemamanparmidautres 12 juin 2017
Tout d’abord, merci à toi pour ta réponse Floriane 🙂
C’est tellement complexe cette histoire de sommeil, le fait d’être ensemble toute la journée, passer des soirées entières à l’endormir et finir en pleurs parce que je suis épuisée, ne rien faire pour moi, pour couper de mon quotidien avec ma Princesse alors que j’en ai besoin, ne pas pouvoir passer le relais comme je voudrais, douter de ce que nous faisons, et évidemment, parce que ça va de paire, subir le regard des autres…
Nous n’avons pas mis de matelas au sol à côté de nous, c’est vrai. Je n’y ai tout simplement pas pensé! Nous venons de déménager, et notre chambre est tout trop petite pour le faire. Mais je crois que j’ai réalisé quelque chose : on ne fait pas mal! On ne fait pas comme tout le monde, coucher systématique à 20h, un bisou, on ferme la porte et on se retrouve demain. Ça ne fonctionne pas.
Lilas a besoin d’autre chose, c’est évident, et au final, c’est seulement nous trois que ça concerne.
C’est vrai que depuis qu’on accepte vraiment son rythme, qu’on l’endort dans notre lit en la rejoignant après, ça se passe mieux. Les réveils nocturnes sont moindres voire inexistants. Les journées sont longues, mais on s’adapte et on est moins sur les nerfs. Et surtout, notre fille est moins angoissée (c’était terrible à voir ces crises qui duraient parfois une heure en pleine nuit!).
Désolée pour le pavé en vrac, mais je me sens moins seule et c’est un soulagement 🙂 alors merci à toi!
Floriane 12 juin 2017
C’est sûr que ce n’est pas simple, mais bien sûr que non vous ne faites pas mal, vous répondez simplement de votre mieux aux besoins de votre fille ! 🙂 Certains enfants ont des besoins plus intenses que d’autres, ne l’oublions pas. Certains ont besoin de plus de temps pour pouvoir s’endormir seul sereinement (et beaucoup y sont contraints aussi, ce qui n’est pas une bonne chose pour eux, et en plus contreproductif à long terme…). Et puis, le coucher systématique à 20h est très culturel, et vers cet âge, une heure physiologique de coucher à 22h n’est pas rare (dixit Mme Filliozat ^^). Mon P’tit Loup fait partie de ceux là, il est du soir, j’en sais quelque chose 😉 (et puis surtout, en regardant autour de moi je constate à quel point c’est fréquent !). Donc oui, vous faites tout bien !
Par contre, c’est vrai que d’autant plus quand on est déjà à la maison avec l’enfant la journée, on a besoin de prendre du temps pour soi aussi. Penses-tu à te caler des petits « rdv » ou tu ne t’occupes que de toi ? Par exemple, le week-end, « booker » le papa pour s’occuper de votre fille pendant que toi tu pars prendre un verre avec une copine (même si ce n’est qu’une heure !), te faire chouchouter chez le coiffeur, faire un peu de shopping, faire un peu de sport… Ces petites « escapades » font un bien fou, et finalement tout le monde en sort gagnant : toi parce que tu seras ressourcée, ta fille aussi qui retrouvera une maman plus zen/de meilleure humeur 😉
Courage et à bientôt ! 🙂
unemamanparmidautres 13 juin 2017
Ca fait tellement de bien de sentir que je ne suis pas la seule convaincue qu’il faut suivre les besoins de son enfant!
Lire « J’ai tout essayé » m’a fait beaucoup de bien, regarder un court extrait d’I. Filliozat sur le sommeil aussi. Mais il faut reconnaître qu’on a peu de clés concernant le sommeil, qu’on se sent souvent démuni parce qu’en marge des autres.
Concernant le temps pour moi, c’est assez compliqué, j’en ai rarement. Surtout en ce moment, parce qu’on vient d’emménager dans la région lyonnaise, que mon compagnon est en formation intensive et travaille, et que je suis en permanence avec Lilas. À part quelques pauses, c’est comme ça depuis sa naissance ! Malgré mon opposition à la base, j’ai décidé de la mettre quelques heures à la crèche dès Septembre pour me dégager du temps, passer mon permis aussi.
Enfin bref, j’essaye de rester positive, me dire que chaque enfant est unique, chaque famille a son fonctionnement, et je ne vais plus chercher à « rentrer dans le moule ». Ça devrait m’aider à avancer plus sereinement !
Encore merci 😉
Claire 10 juin 2017
Juste merci pour cet article toujours aussi bien écrit et vraiment très complet
Floriane 11 juin 2017
Merci à toi ! 🙂
aurelie 11 juin 2017
bonjour, le comportement de votre enfant est tout à fait normal… il lui faut du temps pour concevoir et accepter d’être dans un nouvel environnement (ici le bébé passe de sa maison à la crèche, le matin), puis en vous voyant à midi vous le ramener à un autre environnement en un temps trop rapide (maman=maison) et vous repartez (maison>crèche) et vous revenez le chercher le soir (crèche>maison)…. les professionnels de crèche nous ont expliqu2 ce comportement pour ne pas être frustré lorsque nous venons récupérer notre enfant et que celui-ci mets un certain temps pour nous sauter dans les bras… et parfois il ne souhaite pas quitter la crèche.
Floriane 12 juin 2017
Merci pour ce partage 🙂
Nanakie 14 juin 2017
Je me joins aux autres pour te remercier de ce formidable article qui éclaire ma lanterne sur de nombreuses envies et réflexions que j’ai.
Je suis enceinte, aux yeux de la société je n’ai donc pas encore expérimenté la maternité (premier point sur le quel je ne suis pas d’accord, enceinte je suis déjà maman et j’ai déjà des relations et un lien avec bébé) et j’ai été élevée selon les principes franchouillards français :
– laisse le pleurer il va finir par se taire
– arrête de le prendre il va s’habituer aux bras
– ne l’écoute pas tout le temps il va devenir capricieux
– « arrête de pleurer, je vais te donner une fessée tu auras une vraie raison de pleurer » (quelle horreur cette phrase!)
…
Je suis heurtée et absolument pas en adéquation avec ces éléments de mon enfance, mais je culpabilisais de vouloir une autre éducation que celle que j’ai reçu… et d’avoir un mode de pensée totalement différent. Ton article m’apporte des arguments qui me confortent dans mes envies, qui donnent de la consistance à mes ressentis, je me sens soulagée de lire ça, de lire qu’il sera normal que j’aille voir mon bébé qui pleure, qu’il sera normal de le garder dans mes bras… non il ne va pas devenir un monstrueux psychopathe si je lui apporte de l’attention.
On m’a aussi reproché de prendre le congé parental durant les 6 premiers mois, car de la garder jalousement à la maison ça va le rendre inapte à la sociabilisation. Je suis ravie de lire que non, ça e peut être que bon pour lui.
Bref c’est très long comme commentaire, mais un simple « merci » n’aurait pas été assez. C’est très instructif et très inspirant, et en effet les professionnels de la petite enfance mais aussi les instits devraient recevoir ces infos-là, qui comme tu le soulignes ne viennent pas de sortir de terre !
Floriane 14 juin 2017
Merci beaucoup pour ton commentaire ! Je suis heureuse que mon article ait pu te rassurer et te conforter dans tes choix.
Pour le congé parental, ce n’est que du positif et évidemment cela ne va pas le rendre inapte à la socialisation. On m’a dit la même chose également. Mon fils a 2 ans et est toujours avec moi. Et bien, je peux te dire qu’il est tout sauf associable 😉 En ce moment, lorsqu’on va à l’aire de jeux, il n’a qu’une envie c’est aller voir les autres enfants pour leur parler, leur faire des câlins et des bisous ! 😉
Je te souhaite une belle grossesse et beaucoup de bonheur avec ton bébé. Ces premiers instants sont uniques, alors profites en à fond et ne laisse pas ces mauvaises langues te les gâcher 😉
(Cet article pourra peut être te rassurer sur certains points aussi : http://parents-naturellement.com/mauvaises-habitudes/ 🙂 )
unemamanparmidautres 16 juin 2017
Je voulais rebondir sur le reproche que l’on te fait déjà sur la décision que tu as prise, celle de garder « jalousement » ta fille à la maison. Que c’est injuste!
Tu Peux/veux le faire, et c’est une bonne chose pour vous deux!
Ma fille a deux ans passés, je ne l’ai jamais faite garder depuis sa naissance (elle va commencer à faire quelques heures en crèche dès Septembre), et c’est une petite fille merveilleuse, qui s’épanouit au contact de ses parents, curieuse et éveillée de tout!
Pour l’aspect social, je crois que la collectivité ne fait pas tout (j’y ai travaillé et pensais le contraire jusqu’à devenir Maman). Le caractère et la personnalité de l’enfant le rendent unique.
Notre fille met souvent un peu de temps pour aller jouer avec les copains du parc, ou reste un peu plus près de nous que les autres enfants. Et alors? Elle est heureuse et les interactions avec les autres se feront au fil du temps.
Si tu savais, malgré la fatigue que je ressens et cette fusion (pour plein d’autres raisons), je suis heureuse d’avoir pu passer chaque jour avec elle, la voir grandir, m’émouvoir sur tous ses progrès…
Je te souhaite de ressentir, comme aux autres parents, cette vive émotion 🙂
Nanakie 16 juin 2017
Merci beaucoup pour ce partage d’expérience plein de bienveillance et très encourageant! Je suis moi-même un enfant qui n’a jamais été gardée par qqun d’autre que mes parents ou mes grands-parents, et malgré un caractère réservé les premières minutes, je suis rapidement à l’aise et enjouée quand je rencontre des inconnus! Je côtoie des gens, bref je ne crois pas avoir de problème de sociabilité!
Pour pousser le vice de la non conformité, il s’agit plus exactement de mon Mari qui prendra le congé parental, je suis curieuse de voir s’il devient donc la 1ere figure d’attachement de notre loulou ! Quoiqu’il en soit je suis heureuse pour eux de ces moments privilégiés qui les attendent.
Merci encore et belle continuation pour ta famille 🙂
Guillaume 15 juin 2017
Bonjour,
Tout d’abord merci pour votre travail de démocratisation de ces nouvelles techniques de pédagogies que vous effectuez. Merci beaucoup de nous aider à nous, parents, à trouver des réponses chaque jours à nos problèmes.
Je ne sais pas trop si dans cet espace nous pouvons exposer notre cas personnel, mais la désespération me pousse à écrire toute de même.
Nous avons un petit garçon de presque 2 ans (20 mois), depuis tout petit nous appliquons la théorie de l’attachement et surtout nous nous efforçons qu’il ne se sentent jamais abandonné, qu’il est le moins de stress possible. La maman n’a pas travaillé pendant 18 mois. Il est très attaché à elle.
Depuis presque un an maintenant, nous avons monté une association de parents, nous payons une éducatrice qui s’occupe de 3 enfants maxi pendant 3 heures le matin, pour les habituer à la vie en communauté et être plus autonome sans papa et maman. Tout s’est très bien passé pour le moment, le 1er mois les mamans ou papas passaient les 3 heures avec les les enfants pour effectuer une transition douce et ensuite l’éducatrice a pris le relais toute seule. Un an sans aucun problème.
Or depuis 1 semaine maintenant, date à laquelle la maman se lève plus tôt que notre petit pour aller travailler, notre enfant pleure à s’en asphyxier dès que l’on va à la cette garderie. On note clairement qu’il ne veut pas que l’on le laisse, qu’il a peur.
Notre désarrois est complet, nous avons fait de gros efforts pour lui apporter toute l’attention nécéssaire et du jour au lendemain tout notre travaille tombe par terre.
Le voir pleurer de cette manière est vraiment terrible, faut-il à nouveau que la maman ou moi-même n’aille pas travailler.
Pourquoi tout à coup? La seule chose qui a changé est que désormais maman se lève avant lui.
Merci de votre aide.
Andrea, Mathias et Guillaume
Floriane 18 juin 2017
Bonjour,
Merci pour votre commentaire et vos encouragements pour mon blog 🙂
Effectivement, la situation a l’air difficile et je comprends bien votre désarroi !
Ce que vous me décrivez me fait penser à une phase d’angoisse de la séparation. En effet, il faut savoir qu’elles peuvent aller et venir jusqu’à l’âge de 3 ans et même au delà. On parle beaucoup du cap des 9 mois, mais ce n’est que le début… Pour mon fils par exemple, ses épisodes les plus « violents » ont eu lieu lors de ses 14 mois, puis de ses 20 mois (l’âge de votre fils !). Concernant mon fils, cela se manifestait par une peur terrible de s’endormir le soir (même si je restais à côté de lui, il était terrifié de cette séparation du sommeil). Il hurlait aussi dès que je changeais de pièce. À chaque fois, c’est survenu d’un coup, comme pour vous. À chaque fois, cela est passé en quelques semaines, avec beaucoup d’accompagnement et de câlins. Alors courage, il est fort possible que pour votre fils cela passe aussi en quelques semaines. La meilleure chose à faire je pense est de reconnaître sa souffrance, sa peur, de l’accompagner et le rassurer de votre mieux. Ne surtout pas minimiser ce qu’il ressent.
Oui, la situation serait sûrement moins difficile si vous pouviez rester avec lui pendant cette période, mais malheureusement notre société a ses contraintes et ce n’est pas toujours possible. Mais si vous veillez à passer du temps de qualité exclusivement avec lui chaque jour, c’est déjà beaucoup ! Il s’en sentira rassuré et cela l’aidera à passer cette phase difficile.
Courage, je vous souhaite de tout coeur que la situation se rétablisse vite !
Sachez aussi que d’après les tenants de la théorie de l’attachement : « chez les enfants de moins de 3 ans, ce sont précisément ceux qui ont la meilleure relation avec leur mère qui montrent le plus de douleur lors de la séparation ».
Le fait que votre enfant manifeste de manière spectaculaire ses émotions lors de la séparation témoigne d’un lien d’attachement fort avec sa maman, c’est une réaction très saine qui montre que la relation va très bien ! Je pense qu’il est important de le rappeler, parce que dans ces moments, en tant que parent, on a tendance à culpabiliser énormément, alors que justement, ces réactions témoignent que votre enfant est très attaché à vous et que vous l’avez très bien traité 😉 .
Guillaume 19 juin 2017
Oui, effectivement, après quelques jours supplémentaires, cette peur de l’abandon se manifeste dans d’autres moments de la vie quotidien. Par exemple, il se réveille toutes les heures pendant la nuit pour vérifier que nous sommes bien présents dans la chambre avec lui et demande les bras.
Il y a aussi une phase de jalousie vis-à-vis de moi je pense, même si lorsque la maman n’est pas là il me prend pour référence et ne veux pas me lâcher, lorsque maman est là il me repousse énormément, il ne veut que maman et surtout pas papa.
Merci en tout cas pour votre réponse, merci beaucoup floriane.
Bonne continuation.
ps: je n’est pas pu répondre à votre message en faisant un clic gauche normal sur « répondre », rien ne se passait, il a fallu que j’ouvre une nouvelle fenêtre (clic droit).
Kristell 12 mai 2019
Merci pour toutes ces informations bien expliquées. Je découvre votre blog et il est super bravo! Je pratiquait sans le savoir la parentalité positive mais en essuyant des plâtres et également soumise à mes humeurs et reproduisait souvent les schémas de mon enfance…aujourd’hui je me questionne toujours. Par contre j’ai toujours répondu aux pleurs de ma fille mais j’ai subi beaucoup de pression de mon entourage et j’ai beaucoup culpabilise et douté avec un essai pendant quelques semaines horrible…je suis vite revenue à mon ressenti. C’est un grand regret, je trouve que ça m’a enlevé quelque chose. Aujourd’hui ma fille va avoir 2 ans et devient de plus indépendante et je m’émerveille à chaque fois qu’elle fait un pas de plus vers cet autonomie.
Raphaël 19 juin 2019
Bonjour,
Je ne sais pas trop où je pourrais poster ma demande, donc je me lance ici… Désolé par avance, mon histoire est un peu longue…
Mon épouse et moi-même avons un chouette petit bonhomme de 3 ans et demi… Il est heureusement en bonne santé, il grandit bien, et, je touche du bois, on a jamais eu de souci à ce niveau là…
Mais je dois avouer que je commence sérieusement à titre personnel à m’inquiéter pour lui. Çà fait quelques mois maintenant qu’il est plus difficile disons : il est énormément dans l’opposition systématique, pique des colères et des crises de pleurs de plus en plus fortes, fréquentes et longues, bloque les activités familiales (promenades, visite de la famille,…) avec ses crises, et nous sommes vraiment démunis. En parallèle, il est très très craintif vis-à-vis d’autres enfants. Il joue dans son coin à l’école, et quand nous sommes dans une plaine de jeux par exemple, il peut jouer et descendre du toboggan à l’envi, mais dès qu’un autre enfant monte sur le même toboggan, on le voit se tendre et s’effacer devant l’autre enfant, pour aussitôt faire demi tour et revenir chez nous en demandant de rentrer à la maison (même si on vient d’arriver, genre moins de 2 minutes)… et la c’est des pleurs, des cris,et on rentre en le portant pendant qu’il continue de hurler…car le fait de rentrer ne le calme pas plus…
Je dois signaler, mais comment le faire sans être mal compris, que je n’adhère pas naturellement à toutes ces méthodes éducatives que vous décrivez avec force de convictions sur ce site… J’ai eu une éducation traditionnelle catho classe moyenne, y’avait pas que du bon j’en suis conscient, mais je n’ai pas de reproches à faire à mes parents, ils m’ont entouré d’un amour inconditionnel, et je ne voudrais pas avoir connu d’autre enfance que la mienne. Donc voilà, j’ai pris mon rôle de père comme celui du protecteur matériel, et du guide à qui il faut obéir…C’est caricatural, mais c’est pour un peu situer. Mais aussi je me soigne, je me documente, je lis, j’écoute et essaie de comprendre et d’appliquer les principes de l’éducation bienveillante le plus possible…
Mais il y a deux ans, j’étais effectivement de ceux qui pensaient qu’un bébé, à un moment donné, doit faire ses nuits seul dans sa chambre, et doit être séparé assez vite la journée pour ne pas créer une dépendance excessive vis-à-vis de ses parents… Vous devez tomber de vos chaises. J’ai essayé de convaincre mon épouse de le laisser pleurer quand il était bébé, on l’a fait une 20 aine de minutes une fois, ça m’a fait beaucoup de mal à moi aussi et je n’ai plus insisté.
Je dirais donc que, malgré moi, notre garçon a été materné, choyé, et consolé le plus et le plus souvent possible. Il est resté full time avec sa maman jusqu’à ses 9 mois, où nous avons trouvé une place en crèche, car je trouvais qu’il devait être confronté à des enfants de son âge, à un autre environnement. Mon épouse a accepté mais sans trop d’enthousiasme, et donc notre petit a été en crèche jusqu’à ses 2 ans et demi. Les séparations étaient variables, mais quand mon épouse allait le chercher, elle le voyait bien, occupé dans ses jeux, et pas pressé de rentrer… Les pleurs du matin n’étaient pas systématiques, parfois dus à des congés, et selon les accueillantes, mais je dirais que la majorité du temps, ça se passait sans heurts…
La rentrée en classe d’accueil s’est aussi bien passée. On avait peur qu’il ne s’y fasse pas (on pense que c’est un petit angoissé), mais contre toute attente, il n’y a quasi pas eu de pleurs le matin, et il était bien après l’école. Vu qu’il est malin et curieux, et que son école a l’air très dynamique, c’était le bon moment pour commencer l’école.
A la maison, en ce temps là, j’avais réussi à être le préposé au dodo, et je lui chantais une petite chanson quand il était dans son lit, puis je le laissais s’endormir seul, et tout se passait bien… Il a eu une période de quelques semaines de réveils nocturnes, mais j’arrivais à le calmer et le remettre au lit…c’était éprouvant, mais il se rendormait assez vite.
Il avait déjà un côté je m’oppose à tout par principe, mais pas de grosses crises de larmes ou de cris.
Puis il a commencé à réclamer sa maman pour s’endormir, et lui demandait de rester jusqu’à ce qu’il s’endorme… pas de souci au début, mais après quelques jours, j’ai essayé de revenir avec ma chanson, mais il ne voulait déjà plus que sa maman, et elle devait rester jusqu’à l’endormissement complet. ça pouvait durer 30, 40 minutes sans problème. puis il fallu que maman se couche dans son lit pour s’endormir, et ça aussi c’est devenu systématique. Même quand mon épouse n’en avait pas envie, le petit pleurait pour qu’elle reste. Les quelques rares soirs ou elle était de sortie, j’avais toutes les peines du monde à l’endormir… Grosse galère car elle est subie et non souhaitée par mon épouse. Elle refuse ou retarde des soirées pour pouvoir l’endormir sans pleurs…
Parallèlement à ça, sa crainte des autres n’a pas disparu, elle s’est même renforcée. Il peut se braquer même vis-à-vis d’enfants qu’il connait ou a déjà vus précédemment, et hurle qu’il veut rentrer à la maison. La dernière fois à un anniversaire chez des amis, il s’enfuyait par le jardin pour aller vers la voiture et rentrer…avec pleurs et cris en alternance.
Nous allons aussi avec lui à la Little Gym, depuis qu’il a un et demi. C’est des ateliers de psychomotricité, où il est accompagné d’un parent à chaque fois, et ou il y un petit cours donné par une animatrice très sympa… et je me rends compte qu’il refuse de faire systématiquement des choses, il ne veut même pas essayer, même si je reste près de lui, il hurle pour ne pas qu’on s’approche des barres par exemple. Il ne veut pas essayer de se pendre par les bras, pourquoi??? Les autres enfants ne semblent pas faire de problème, mais lui refuse même de regarder, d’envisager d’essayer… c’est très difficile de le contraindre (gentillement bien sûr) à faire quelque chose, c’est assez désarmant comme sentiment.
Donc voilà, moi j’ai peur, et je pense que mon épouse applique à l’excès les préceptes de maternage proximal, de réponse à 100% aux pleurs, et d’anticipation de toutes ses craintes (qu’elles soient réelles ou non). Et quand j’essaie d’en parler à mon épouse, elle me redirige vers votre groupe, en me disant que c’est en le préservant de toutes ses craintes qu’il prendra confiance en lui, que ça s’arrangera tout seul, etc…
Ne pensez-vous pas, qu’à force de lui éviter tout ce qui le contrarie, ou qui pourrait lui être inconnu, on ne l’enferme dans une bulle artificielle, où le voisin serait quelqu’un dont on a peur, et ou chaque environnement non connu, activité nouvelle soit source de peur? Est-ce qu’il ne deviendra pas inadapté socialement s’il a peur des autres enfants? Je veux pas qu’il soit un mouton influençable, je veux qu’il se sente bien en société, pas craintif à se chercher des personnes protectrices…parce que nous ne lui avons pas appris qu’il avait tout ce qu’il faut en lui pour être debout seul, et qu’il peut même à son tour de protéger les plus faibles.
Je souhaite par exemple qu’il fasse un stage pour enfants de son âge pendant les congés d’été. C’est parfaitement encadré, c’est des groupes de 8 enfants, mais il ne les connait pas, et l’école ou cela se passe il ne la connait pas non plus… C’est des stages d’une semaine, je me dis que s’il en fait deux sur les deux mois de congés c’est pas mal… Et quand je présente ça à ma femme, elle est contre et sa première réaction est de me lister la liste de tout ce qui n’ira pas : endroit inconnu, personnes inconnues, il aura peur, il va pleurer tout le temps, on va l’abandonner, etc, etc, etc… A aucun moment elle n’envisage qu’il puisse se faire un ou des copains, qu’il découvre un sport ou une activité qui lui plaise, qu’il s’amuse avec des enfants de son âge… Simplement parce que quand on va arriver, il va pleurer. C’est dommage non?
Ne pensez-vous pas qu’à un moment, le confronter à une situation nouvelle avec des enfants, de manière régulière, où il se rend compte qu’à chaque fois au final maman et papa reviennent le chercher, lui permettrait de devenir un peu plus malléable aux situations qui lui sont peu familières?
Je suis peut-être cynique, mais je sais que je ne suis pas éternel, ni mon épouse .Il est bien sûr trop petit pour être autonome maintenant, mais, dans mon esprit, l’un des rôles majeurs de ma mission de papa, c’est de l’élever pour être un jour un homme indépendant… Et ça passe inévitablement par une bonne estime et confiance en soi. Et je suis certain que c’est maintenant qu’il se la construit sa confiance en lui. Et donc, toujours dans mon raisonnement ‘basique’, je me dis que si on a peur de l’envoyer vivre de nouvelles expériences, qu’on ne le rassure pas sur le fait qu’il a tout ce qu’il faut pour s’endormir même quand maman n’est pas là, qu’on accède à toutes ses requêtes en s’oubliant soi-même (ok pour sa colère, mais pourquoi dois-je assister à ses cris, qu’il aille s’apaiser dans sa chambre. Là c’est chez lui, il peut se fâcher, crier, faire ce qu’il veut, mais pas au milieu du salon, ou nous obliger à courir derrière lui si on est blessé ou fatigué, etc..), est-ce qu’on n’est pas occupés à lui prouver que justement, il ne peut pas être seul, lui même comme entité, et qu’il devra toujours passer après le filtre maternel?
J’ai aussi l’impression que l’angoisse par défaut de mon épouse ne soit transposée à lui, et que si elle craint que ça se passe mal, ben lui aussi sent que quelque chose cloche et qu’il va pas aimer… Comment on gère ça, sans passer pour un tyran maléfique assoiffé de cris et de sanglots???
Un dernier exemple que j’ai déjà soumis à mon épouse est le fait qu’on ne pourrait pas avoir un autre enfant car, et ce sont les paroles de mon épouse, « elle ne pourrait pas lui faire ça »… La question d’un autre enfant n’est pas à l’ordre du jour, mais c’est quand même dingue de se dire qu’il n’y a pas d’autre place pour un frère ou une sœur car notre garçon accapare déjà tout l’amour et la disponibilité de sa maman. Comment font les autres familles???
Je m’épanche, désolé, mon texte est interminable et pourtant je trouve que je n’ai pas assez décrit les choses pour l’expliquer au mieux. Je sais aussi que, comme toutes choses, l’éducation et les principes, quel qu’ils soient, sont une question de nuances, et que nul n’est 100% bon ou mauvais… Mais donc, à la lumières de vos expériences à tous et toutes, pouvez-vous me dire sincèrement comment vous gérez des situations telles que la nôtre? Suis-je tout-à-fait dans le noir et dois-je juste attendre patiemment qu’un jour mon petit gars aille vers un autre enfant comme par magie et demande à sa maman de sortir de son lit car il veut dormir seul maintenant? Je n’y crois pas une seconde, mais je promets de lire attentivement et l’esprit ouvert tous vos témoignages…
Merci pour ceux qui ont lu ce texte jusqu’au bout, et aussi à ceux qui voudront bien y répondre.
claude joubert 10 octobre 2019
Cela me gêne un peu d’entendre dire que la théorie de l’attachement entre dans un cadre ‘scientifique ». Nicole Guédeney nous fait valoir son travail par des apports théoriques « scientifiquement prouvés ». Quand n’est-il de ce formidable outil qu’est le langage et quoi de mieux que le langage pour proPoser à nos enfants des moyens de pénétrer dans un processus relationnel nécessaire à leur développement ? Bien sûr qu’il faut rassurer, accompagner, réagir aux appels de détresse, mais la théorie du lien de l’attachement risque de se métamorphoser en lien d’ultra dépendance, ce qui signifie que les explications données par Nicole Guédeney n’évoque pas tous les risques de la « relation tourbillonnante », de la « relation fusionnelle » empêchant le développement de l’enfant vers une bonne autonomie….
Floriane 29 octobre 2019
Ce que dit la théorie de l’attachement, c’est justement que ce que vous appelez la « relation fusionnelle » au départ est la condition d’une bonne autonomie plus tard.. C’est justement en ne répondant pas aux besoins d’attachement de l’enfant qu’on l’empêche son développement vers une « bonne autonomie »…
Ran 18 mars 2023
Bonjour,
Même après plusieurs années cet article reste passionnant et d’actualité.
Il me vient une question : le « caregiver » ou figure d’attachement principale, doit être un choix de couple qui prend en compte aussi les réalités matérielles.
Je ne l’ai pas été pour nos aînés à causes de ces réalités justement, et pour le prochain (encore en projet !) je voudrais prendre ce rôle. Je ne connaissais pas tout ça et j’ai énormément souffert de toujours passer en second.
Je reprends ma question : est-ce un choix conscient, que l’on prend à deux ? Y a t’il un mode d’emploi quand on ressent le besoin d’être le « primary caregiver » ?
Merci 🙂